suivre en silence leur course obscure et désolée. J’entendis prononcer mon nom, je sentis une main sur mon épaule, je me retournai et bientôt Houseman se trouva à côté de moi.
— Eh bien ! on est en train de philosopher, me dit-il avec son rude sourire.
Je ne lui répondis pas.
— Regardez donc, me dit-il en me montrant du doigt la rivière, voyez comme ce poisson guette sa proie. Eh bien, est-ce que vous ne savez pas lire ce que la nature enseigne, ce qu’elle enseigne toujours et partout ?
Je restai silencieux.
— Ceux qui ne font pas comme les autres, reprit-il, ne remplissent pas le but pour lequel est faite l’existence ; ils visent à en savoir plus long que les autres, et pour les en récompenser on les traite de fous. Est-ce qu’il n’en est pas ainsi ? Je suis, un ignorant et je ne demande qu’à m’instruire.
Je restai toujours silencieux.
— Vous ne répondez pas, dit-il, est-ce que vous êtes fâché ?
— Non.
— Eh bien, continua-t-il, si étrange que la chose vous paraisse, nous sommes, vous et moi, dans la même situation, malgré la différence qu’il y a entre votre esprit et lu mien. Je n’ai pas une guinée à moi, vous en êtes peut-être au même point. Mais il y a pourtant une différence, remarquez-la bien. Moi, l’homme ignorant, avant qu’il se soit écoulé trois jours, j’aurai garni ma bourse ; et vous, le savant,