Page:Bulwer-Lytton - Le Maître d’école assassin, 1893.djvu/53

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qui se trouvait sur sa route ; déshonorant ses cheveux gris par une luxure effrénée, pourriture plutôt que passion en son cœur : c’était un être nuisible et maudit en ce monde. Qu’allais-je faire après tout ? débarrasser la terre d’un être à la fois vil et venimeux. Était-ce un crime ? était-ce un châtiment ? Je sentais en moi la volonté, un esprit capable d’être utile à l’espèce humaine. Il me manquait les moyens d’accomplir cette volonté, de donner des ailes à cet esprit. Une action, une seule, et j’avais ces moyens. Si la victime de cet acte avait été un homme de quelque bonté, un de ces hommes qui suivent d’un pas régulier la ligne étroite qui sépare le vice et la vertu, ne causant ni bien, ni mal à personne, j’aurais eu encore le droit de me demander si l’humanité ne gagnerait pas à mon action. Mais il s’agissait d’un homme que n’avait jamais arrêté aucune bonne pensée, dont le cœur n’avait jamais éprouvé une émotion généreuse ; c’était une tache, une erreur de la création, et rien que la mort ne pouvait laver cette souillure et rendre au monde sa pureté. Le soldat reçoit sa paie, il tue et s’endort tranquillement, et les hommes applaudissent. Mais, dites-vous, il frappe pour gagner sa paie, et non en vue de la gloire. Accordons-le, quoique ce soit un sophisme. Mais n’y aurait-il pas de gloire à conquérir dans une sphère bien plus noble que celle de la guerre ? N’y aurait-il aucune gloire à conquérir en cultivant la science, qui conserve au lieu de détruire ? Le coup que j’allais frapper