Page:Bulwer-Lytton - Le Maître d’école assassin, 1893.djvu/70

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j’avais dû violenter mon naturel, j’avais fait cette démarche, non avec l’humilité d’un mendiant, mais avec la dignité d’un homme qui réclame ce qui lui est dû, et ma demande avait reçu un accueil inspiré par le même sentiment : J’allais donc être heureux ; je croyais Houseman écarté pour toujours de ma route ; Madeleine serait bientôt à moi, je m’abandonnais de nouveau à l’amour ; ébloui, plein d’illusion, j’allai en avant, et j’ouvris les yeux trop tard ; j’étais au bord du précipice dans lequel je vais tomber. Vous savez le reste. Mais alors quelle ne fut pas mon épouvante ! j’appris tout : ce Clarke était son oncle, et cet homme que j’avais tué en croyant ne détruire qu’une des unités qui composent l’espèce humaine, ce Clarke était le frère de Lester ! Vengeance mystérieuse de la destinée, toujours infaillible et ingénieuse dans ses coups ! Ainsi, au moment même où je me croyais le plus loin d’elle, sa main allait se refermer sur moi, qui étais venu m’y jeter ! Réfléchissez-y, jeune homme, il y a dans cela une morale dont bien peu de prédicateurs peuvent vous parler d’une façon aussi convaincante que moi. Réfléchissez-y. Les cas où les hommes violent les lois particulières sont peu nombreux, comparativement à ceux où ils enfreignent les lois générales. C’est surtout dans ces dernières circonstances que nous nous berçons de sophismes qui ont l’apparence de vérités. Au point de vue particulier, il m’était aisé de me démontrer à moi-même que je n’avais commis aucun crime ; j’avais fait