Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874, tome I.djvu/107

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cence de notre attachement, la duchesse fut excessivement troublée ; il y avait à gauche de l’ottomane où nous étions assis une petite porte… « Non, non, pas par là, » me cria la dame ; mais moi qui ne voyais pas d’autre retraite, j’entrai néanmoins ; et avant qu’elle eût le temps de m’en faire sortir, le duc était dans la chambre.

Pendant ce temps, je m’amusai à examiner les merveilles du nouveau monde dans lequel je venais d’être plongé si brusquement. Sur une petite table, près de moi, était déposé un bonnet de nuit d’une forme et d’une structure singulière ; je l’examinai comme une curiosité ; de chaque côté était placée une petite côtelette de veau cru cousue au bonnet avec de la soie verte (je me souviens encore des moindres détails de cette aventure) ; une belle perruque d’un blond doré reposait à côté sur un support (la duchesse ne voulait jamais me laisser jouer avec ses cheveux) ; sur une autre table était une rangée de dents, d’une blancheur éblouissante. Je demeurai environ un quart d’heure dans ce laboratoire des grâces ; au bout de ce temps, la soubrette (la duchesse avait eu le bon goût de disparaître) vint me délivrer et je me glissai dans l’escalier avec la joie d’une âme qui a fait son temps de purgatoire.

Depuis ce moment la duchesse m’honora d’une haine mortelle. Sotte non moins que méchante, ses plans de vengeance furent aussi ridicules dans l’exécution qu’impitoyables dans l’intention. Une fois, il ne s’en fallut de rien que je ne fusse empoisonné dans une tasse de café ; un autre jour, elle essaya de me tuer en me frappant à l’endroit du cœur avec un couteau à papier.

Loin d’être découragée par le mauvais succès de ces attentats, ma belle ennemie avait résolu ma mort ; il lui restait encore un moyen pour atteindre son but ; elle le tenta, ainsi que le lecteur le verra bientôt.

M. Thornton était venu deux fois me demander, et deux fois je lui avais rendu sa visite sans qu’aucun de nous pût profiter de cette réciprocité de politesses. Il était lié avec le mystérieux héros de la maison de jeu et du Jardin des Plantes ; je prenais, malgré moi, un intérêt très-vif à ce personnage mystérieux, car j’étais sûr de l’avoir vu au-