Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874, tome I.djvu/227

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maréchal de***, un fameux gourmet. Je dîne tous les jours à huit heures précises, et je n’accepte jamais de dîner en ville. Ma table est toujours servie pour trois personnes et vous êtes sûr de trouver ici à dîner toutes les fois que vous n’aurez pas d’engagement ailleurs. Que pensez-vous de mon goût en fait de tableaux ?

— Je n’ai qu’une chose à dire, lui répondis-je, c’est que, depuis que je sais que je dois dîner si souvent avec vous, je souhaite que votre goût en fait de vins soit seulement à moitié aussi bon.

— Nous sommes tous, me dit Glanville avec un léger sourire, nous sommes tous, comme dit un vieux proverbe très-sensé, de grands enfants. Notre premier jouet est l’amour, le second le bruit et le besoin d’attirer sur nous l’attention, chacun suivant son genre d’ambition. Il y en a qui choisissent les chevaux, d’autres les honneurs, d’autres les festins, d’autres, le mobilier ou les tableaux. Tant il est vrai, Pelham, que nos premiers désirs sont les plus purs : en amour, nous ne sommes avides des belles choses qu’en vue de l’objet aimé ; dans le faste nous ne sommes occupés que de nous-mêmes. Ainsi la première couche de notre esprit est fertile et productive pour les autres ; la seconde, plus aride, suffit à peine à notre propre consommation. Mais voilà assez de morale. Voulez-vous m’emmener dans votre voiture ? je vous promets que vous n’aurez jamais vu personne de plus prompt à sa toilette.

— Non, lui dis-je, je me suis fait une règle de ne jamais promener dans ma voiture un ami mal habillé, j’aime mieux que vous preniez votre temps, et alors je vous permettrai de venir avec moi.

— Allons, soit. Lisez-vous quelquefois ? Si cela est, mes livres sont faits pour être ouverts et vous pouvez les feuilleter pendant que je vais me mettre à ma toilette. Tenez, voici deux ouvrages, l’un en vers, l’autre, en prose. Le second traite de la question catholique : tous les deux me sont dédiés. — Seymour, mon gilet ! — Voyez ce que l’on gagne à meubler sa maison autrement que tout le monde ; on devient un bel esprit et un Mécène immédiatement. Croyez-moi, si vous êtes assez riche pour cela, soyez excentrique, il n’y a pas