Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874, tome I.djvu/25

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

puis (évidemment il ne me voyait pas) il joignit les mains, les éleva vers le ciel, et murmura des mots que je ne pus entendre distinctement ; comme je m’avançais davantage vers lui, non sans éprouver un certain malaise, un grand chien noir, qui jusque-là était resté à l’état de chien couchant, s’élança sur moi avec un grognement féroce.


Sonat hic de nare canina
Litera,


comme dit Perse. J’étais trop terrifié pour bouger de place ;


Obstupui, steteruntque comæ.


Et j’eusse été infailliblement converti en pâtée à chien, si notre connaissance commune ne fût sortie de sa rêverie pour rappeler son animal par son vrai nom : Terreur. Après cela, rabattant son chapeau sur ses yeux, l’homme passa rapidement devant moi et disparut avec son chien. Je ne pus me remettre de ma frayeur pendant une heure un quart. Je marchais, ô mon Dieu ! comme je marchais ! Je songeais à faire ma paix avec le ciel, et à m’amender, car, comme le dit avec vérité Pline :


Timor est emendator asperrimus.


M. Wormwood était en proie, pendant ce récit, à une vive impatience et méditait une sortie contre lord Vincent, lorsque l’entrée de M. Davison vint faire diversion et changer son plan d’attaque.

« Juste ciel ! dit M. Wormwood, en laissant tomber son petit pain, vous paraissez bien malade aujourd’hui, M. Davison ! la face est rouge, les veines gonflées ! Terribles truffes ! Miss Trafford, voudriez-vous avoir la complaisance de me passer le sel ? »