Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874, tome I.djvu/287

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bientôt exposer en public vos opinions plus ouvertement que vous ne l’avez fait jusqu’ici, et alors il sera trop tard. À présent je maintiens avec Hudibras et les anciens qu’il est bien plus honorable de : sauver un citoyen que de tuer un adversaire.

— Hélas ! Vincent ! lui dis-je, je suis marqué pour le massacre, car vous ne pouvez me convaincre par des paroles, et il ne vous reste plus que les coups pour venir à bout de moi. Adieu, je vais chez lord Dawton, et vous, où allez-vous ?

— Je monte à cheval, et je vais rejoindre parca juventus, » dit Vincent en riant lui-même de sa plaisanterie. Nous nous serrâmes la main et partîmes chacun de notre côté.

Je suis vraiment désolé, cher lecteur, de ne pouvoir t’initier à tous les détails de mes intrigues politiques.

Le rôle actif que je dus jouer alors m’impose une grande réserve à l’endroit des manœuvres dont je fus témoin et acteur, et des principaux personnages qui en dirigeaient l’exécution. Il suffira de dire que la plus grande partie de mon temps était furtivement employée à une sorte de diplomatie intime qui flattait également mon goût pour l’activité, et ma vanité. J’avais inspiré à Dawton et à ses collègues une estime exagérée pour mon habileté. Je trouvai moyen de me soutenir à cette hauteur : je me levais avant le jour et j’employais au travail le plus soutenu, les heures que tous les autres membres de notre parti gaspillaient dans un sommeil énervant, fruit de la dissipation et des débauches de la veille. Débattait-on une question d’économie politique, mon argumentation était toujours la plus vive et la plus claire ; s’agissait-il d’examiner une période de notre histoire parlementaire, c’était moi que l’on chargeait d’en faire l’exposition. Grâce à madame d’Anville, avec laquelle j’avais des rapports constants (non plus comme soupirant mais comme ami), j’étais au courant, jusque dans les moindres détails, des projets et des manœuvres de la cour où se passait la plus grande partie de sa vie et où son mari était chargé de missions secrètes et très-importantes. Je n’épargnai rien pour étendre mes connaissances sur les points