Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874, tome I.djvu/49

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désirer faire la connaissance d’un homme, c’est une raison pour qu’il vous batte froid, il s’imagine que vous en voulez à sa femme ou à ses dîners. En France au contraire vous ne perdez rien à être poli ; il ne se trouvera personne pour traiter votre civilité de présomption ou d’intrigue. Si la princesse de T… et la duchesse de D… vous invitent (ce qui ne peut manquer d’arriver sitôt que vous aurez remis vos lettres), allez chez elles deux ou trois fois par semaine, le soir, quand ce ne serait que pendant quelques minutes. Il est très-difficile de se faire admettre dans le grand monde en France, mais quand vous y êtes entré, c’est votre faute si vous ne pénétrez pas jusqu’à l’intimité.

« Il y a beaucoup d’Anglais qui se font une sorte de scrupule de rendre visite le soir ; cette crainte est tout à fait déplacée. Les Français ne sont jamais honteux et embarrassés comme les Anglais, dont la personne, la famille et la maison ne sont jamais prêtes pour une visite, excepté quand tout est arrangé à l’avance pour une réception.

« Il ne faut pas vous figurer que ce que les Français appellent de l’aisance dans les manières soit la même chose que ce que nous appelons du même nom en Angleterre. Vous ne devez pas vous étendre sur votre fauteuil, ni mettre vos pieds sur les tabourets, ni, en un mot, vous oublier un seul instant quand vous causez avec une femme.

« Vous avez beaucoup entendu parler de la galanterie des dames françaises ; mais rappelez-vous qu’elles exigent d’un homme beaucoup plus d’attentions que les Anglaises et qu’après un mois d’une cour assidue un seul moment de négligence peut vous faire perdre le fruit de tous vos soins.

« Mon cher enfant, n’interprétez pas mal ces conseils ; il va sans dire que toutes vos liaisons seront purement platoniques.

« Votre père est retenu ici par la goutte, et il est d’une humour terriblement maussade, aussi j’évite autant que possible de le rencontrer ; j’ai dîné hier chez lady Roseville ; vous lui plaisez beaucoup, elle trouve vos manières excellentes. Elle dit qu’elle ne connaît personne qui puisse