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CHAPITRE LXXI


La première personne que je vis chez le duc de ***, fut M. Mivart, il faisait l’office de gentleman huissier : la seconde fut ma mère ; elle était, comme d’habitude, entourée d’hommes, « ombres des héros qui avaient été, » restes des anciens jours, où elle aurait pu rivaliser dans l’art de la danse, même avec la gracieuse duchesse de B***. Sur les dandies de son temps elle avait conservé son ancien empire ; et il était assez amusant d’entendre les discours amoureux de chaque ci-devant jeune homme qui continuait, par habitude, les compliments que trente ans auparavant il avait commencés par admiration.

Ma mère était véritablement ce que le monde appelle une charmante femme. Peu de personnes avaient plus de succès dans la société : ses manières étaient la perfection même, son sourire, un charme ; elle vivait, se mouvait, respirait, seulement en vue du monde, et le monde lui tenait compte de la persévérance de son zèle. Cependant, si ses lettres ont donné à mes lecteurs quelque idée de son caractère, ils auront pu voir que ce même désir de suprématie dans le ton donnait (le ciel me pardonne mon impiété filiale !) une sorte de demi-vulgarité à ses idées ; car ceux qui vivent exclusivement pour l’opinion des autres, manquent toujours de cette dignité personnelle qui seule peut donner de l’élévation aux sentiments. Les plus réellement irréprochables aux yeux de la mode sont souvent