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ceux à qui manque l’aristocratie franche et naturelle de l’esprit.

Je rejoignis le cercle de ma mère et bientôt lady Frances trouva l’occasion de murmurer à mon oreille : « Vous avez bonne mine et vous êtes un fort joli homme ; je vous déclare que vous me ressemblez un peu, surtout par les yeux. Je viens d’entendre dire que miss Glanville va être une riche héritière, car le pauvre sir Réginald ne peut vivre longtemps encore. Elle est ici ce soir ; ne perdez pas cette occasion, je vous prie. »

Mes joues brûlèrent comme du feu à ce discours. Ma mère me fit observer tranquillement que j’avais de belles couleurs, et qu’il fallait en profiter pour chercher immédiatement à rencontrer miss Glanville de peur qu’elles ne vinssent à se passer si j’y mettais le moindre retard ; et elle me laissa là pour parler d’un déjeuner public qui devait se donner bientôt. Je passai dans le salon de danse ; là je trouvai Vincent ; je ne l’avais jamais vu plus en train.

« Eh bien ! dit-il, en ricanant, vous n’occupez pas encore votre siège. Je suppose que le représentant de lord Dawton dont vous devez prendre la place est comme Thésée, sedet æternumque sedebit. C’est bien dommage que vous ne puissiez pas entrer avant la semaine prochaine ; car nous allons avoir de brûlantes motions dans la Chambre basse, à ce que disent les astrologues. »

Je souris. « Ah, mon cher ! lui dis-je, Sparte a beaucoup de fils plus dignes que moi ! Cependant comment vont les nobles lords Lesborough et Lincoln ? Avouez qu’on n’a jamais vu une pareille paire d’amis formés exprès par la nature.

— Peuh ! fit Vincent assez brusquement, ils iront leur petit bonhomme de chemin, avant que vous fassiez le vôtre. Oubliez-les, mais ne vous oubliez pas, souvenez-vous que César joue le rôle d’ingrat. »

Vincent me quitta ; mes yeux étaient rivés à terre ; la belle lady *** passa près de moi : « Quoi ! vous, rêveur ! dit-elle en riant ; il ne manque plus que de voir notre hôte lui-même tourner à la mélancolie !

— Dam ! lui dis-je, comment voulez-vous qu’on soit