Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/138

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— Certainement, lord Dawton, ou, à tout événement, jusqu’à la prorogation du Parlement. Comment, en vérité, pourrais-je faire autrement avec la bonne promesse de Votre Seigneurie, que j’ai devant les yeux ! M. ***, le membre pour votre bourg de *** a, je crois, accepté les districts de Chiltern ? Je vous suis vraiment bien obligé de la promptitude que vous avez mise à remplir votre promesse envers moi.

— Hem ! mon cher Pelham, hem ! » murmura lord Dawton. Je me penchai vers lui comme pour l’écouter avec déférence, mais en réalité pour mieux voir son embarras, et jouir de plus près de sa confusion. Il leva les yeux et saisit mon regard, et comme il ne fut pas trop satisfait de l’expression involontaire de mes yeux, il devint de plus en plus embarrassé ; enfin il rappela son courage.

« Eh mais ! cher monsieur, dit-il, oui vraiment, je vous ai promis ce bourg ; mais souvent les amitiés personnelles doivent être sacrifiées au bien public. Tout notre parti insistait pour que l’on envoyât M. V*** à la place du dernier membre : que pouvais-je faire ? J’ai fait valoir vos droits ; mais tous, jusqu’au dernier, se sont récriés sur ceux de votre rival. Il est certain qu’il est plus âgé que vous et que sa famille est très-puissante dans la Chambre-Basse ; bref, vous apercevez, mon cher Pelham vous comprenez… vous devez sentir combien ma position était délicate ; on ne pouvait pas commencer par se montrer trop ardent pour ses propres amis, et je fus forcé de céder. »

Lord Dawton s’était tant bien que mal acquitté de son speech ; il ne me restait donc plus qu’à le féliciter sur ce chef-d’œuvre.

« Mon cher lord, commençai-je, vous ne pouviez pas me faire plus de plaisir : M. V*** est un très-estimable homme, et je ne voudrais pour rien au monde vous avoir exposé au soupçon de faire passer une vétille telle que votre honneur, c’est-à-dire, la promesse que vous m’avez faite, avant les exigences, c’est-à-dire les intérêts de votre parti ; mais n’en parlons plus. Votre Seigneurie était-elle chez le Duc de *** la nuit dernière ? »