Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/164

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maison, qui semblait ne pas avoir de porte. Sombre et triste, le bâtiment massif paraissait digne de la destination à laquelle il était consacré. Il se passa beaucoup de temps avant que nous pussions éveiller quelqu’un qui répondît à notre appel ; enfin je fus introduit dans un petit parloir ; je revois encore en souvenir tous les menus objets qui garnissaient cette chambre ! variétés étranges qui se rencontrent dans les passions extrêmes ! quelquefois le même sentiment émoussera tous nos sens ; quelquefois il les rendra cent fois plus subtils !

« Enfin parut un homme au teint de rose, aux lèvres souriantes. Il me montra une chaise, se frotta les mains, et me pria de lui expliquer mon affaire ; peu de mots suffirent. Je demandai humblement à voir sa malade. Je demandai qui l’avait autorisé à se charger de lui donner ses soins. La figure de l’homme changea visiblement. Il n’était pas très-charmé de la nature de ma visite. « La dame, dit-il, froidement, avait été confiée à ses soins, avec une rémunération honnête, par M. Tyrrel ; et, sans la permission de ce gentleman, il ne pourrait même pas se permettre de me la laisser voir. » Je réprimai mon agitation ; j’avais quelque expérience, sinon de la nature des maisons de fous, au moins de l’espèce humaine. Je réclamai la malade comme ma femme ; je lui exprimai la reconnaissance de ses soins et le suppliai d’accepter une nouvelle récompense que je lui présentai et qu’il accepta en effet avec ardeur. La glace était rompue ; il n’y a pas d’enfer dont un rameau d’or ne vous puisse ouvrir les portes.

« L’homme ne me retint pas plus longtemps ; il se hâta de me conduire. Nous traversâmes de longs corridors ; quelquefois le faible gémissement de la souffrance et de la faiblesse arrivait à mon oreille ; quelquefois c’était le murmure confus d’un soliloque que radotait quelque idiot. D’un corridor qui coupait celui par lequel nous avancions, partit un cri farouche et perçant, qui s’éteignit tout à coup dans le silence ; peut-être comprimé sous le fouet !

« Nous étions alors dans un autre département de l’établissement. Tout était calme, silencieux, sourd, sans vie ; cela me semblait plus effrayant encore que le terrible cri