Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/175

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mérité et qu’il allait bientôt subir. Pourtant, il y en avait un que l’affection lui attachait encore et pour lequel il semblait conserver quelques-uns des sentiments plus purs des jours d’autrefois où il était moins dégradé et moins coupable. Cette personne, (vous devinerez aisément que c’était une femme) je n’eus pas de repos que je ne l’eusse enlevée à ma victime. Je ne voulais pas lui laisser une consolation, à lui qui ne m’en avait laissé aucune. J’usai de tous les moyens de séduction pour le ruiner dans son affection. Tout ce que les promesses et les serments pouvaient faire, fut essayé ; enfin, ce ne fut pas sans succès ; je triomphai. La femme devint mon esclave. C’est elle qui, toutes les fois que Tyrrell hésitait dans sa course vers la destruction, combattait ses scrupules et triomphait de sa répugnance. C’est elle qui m’informait en détail du pitoyable état des finances de ce misérable et qui aida, de tout son pouvoir, à en accélérer la ruine. La trahison plus cruelle encore de l’abandonner dans son plus extrême besoin, je la réservai pour une occasion meilleure. J’en jouissais d’avance avec une joie sauvage.

« Je fus gêné dans mon plan par deux circonstances ; d’abord par votre connaissance avec Thornton, et secondement par une somme très-inattendue de deux cents livres sterling que Tyrrell reçut vers cette époque en retour de son renoncement à toute réclamation ultérieure contre les acquéreurs de son bien. Quant à la première, comme elle pouvait contrarier mes desseins, ou me mettre en évidence, vous devez me pardonner d’y avoir promptement mis un terme ; la seconde me jeta dans une grande consternation car la première idée de Tyrrell fut de renoncer au jeu et de s’efforcer de vivre de cette maigre pitance qu’il venait de recevoir, aussi longtemps que la stricte économie le lui permettrait.

« Cette idée, Marguerite, la femme dont j’ai parlé, suivant mes instructions, la combattit avec tant d’art et de succès que Tyrrell céda à son penchant naturel et retourna de nouveau à la table de jeu. Cependant j’étais poursuivi sans cesse par mon impatience de voir finir cette partie préliminaire de ma vengeance ; aussi, Thornton et moi