Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/187

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« Cependant, depuis peu, les persécutions et les exigences de Thornton se sont élevées à ce point, que j’ai eu toutes les peines du monde à me contraindre et à subir sa loi. La lutte est trop forte pour ma constitution ; elle précipite le plus terrible et le dernier combat que j’aurai à livrer « avant que le scélérat cesse de me persécuter ; avant que la victime harassée trouve enfin le repos. » Depuis quelques jours j’en suis venu à une résolution que je suis maintenant sur le point d’exécuter ; c’est de quitter ce pays et de chercher un refuge sur le continent. Là je me soustrairai aux poursuites de Thornton et au danger dont elles me menacent ; là, inconnu et tranquille, j’attendrai la fin de mon mal.

« Mais deux devoirs me restaient à remplir avant mon départ ; je les ai maintenant accomplis tous les deux. L’un était envers l’être au cœur ardent et noble qui m’a honoré de son intérêt et de son affection, l’autre envers vous. Je suis allé hier chez elle, je lui ai esquissé cette histoire que je viens de vous raconter en détail. Je lui ai fait voir à nu les ravages de mon cœur, je lui ai parlé du mal qui me consume. Oh ! la belle chose que l’amour d’une femme ! Elle voulait me suivre au bout du monde ; recevoir mon dernier soupir, me voir enfin couché dans le repos qui doit finir mes peines ; et cela sans une espérance, sans une pensée de récompense, même de la part de mon indigne amour.

« Mais en voilà assez ! — Je lui ai fait mes adieux. Vos soupçons, je les avais vus et pardonnés, ils étaient si naturels ; je me devais de les dissiper ; je sens que j’y ai réussi ; mais j’avais encore une autre raison pour vous faire mes confessions. J’ai usé le roman de mon cœur, et maintenant je n’ai aucune indulgence pour les petites délicatesses et les petits scrupules qui souvent viennent embarrasser la route de notre bonheur réel. J’ai remarqué vos premières intentions sur Hélène, et avec, beaucoup de joie, je l’avoue ; car je reconnais, au milieu de toute votre ambition mondaine, de toute l’expression artificielle de votre extérieur compassé, que votre cœur n’en est pas moins un cœur ardent et généreux ; votre esprit, une intelligence d’élite ; et