Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/196

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chira en mille morceaux et le foula aux pieds : « Allez ! s’écria-t-il, allez, coquin, faites ce que vous voudrez ! Je ne veux pas me réduire à la misère pour vous enrichir. Toute ma fortune répondrait à peine à cette extorsion.

— Comme il vous plaira, sir Réginald, répondit Thornton en grinçant des dents, comme il vous plaira. Il n’y a pas loin pour aller d’ici à Bond-Street, ni pour sauter de Newgate à la potence. Faites comme il vous plaira ! » Et le scélérat se jeta sur le divan, considérant le visage de Glanville avec une impudente et maligne effronterie qui semblait dire : je vois bien que vous voudriez regimber mais vous êtes pris.

Je tirai Glanville à part : « Mon cher ami, lui-dis-je, croyez que je partage toute votre indignation ; mais il faut se résigner à tout plutôt que d’exaspérer ce misérable : qu’est-ce qu’il demande ?

— Je vous parle à la lettre, reprit Glanville, quand je vous dis qu’il enveloppe d’un coup presque toute ma fortune, à l’exception des terres qui sont assurées à l’héritier masculin de la famille ; car mes habitudes de prodigalité ont considérablement diminué mon bien ; c’est la somme exacte que j’avais mise de côté pour le présent de noces de ma sœur, en sus de sa propre fortune.

— Alors, lui dis-je, vous la donnerez à cet homme ; votre sœur n’a plus besoin de dot : son mariage avec moi la dispense d’en avoir une. Quant à vous, vos besoins ne sont pas nombreux, et, quelle que soit ma fortune, vous pouvez la partager.

— Non, non, non ! » s’écria Glanville, et sa généreuse nature redoublant de fureur, il se débarrassa de mon étreinte pour s’avancer d’un air menaçant vers Thornton. Celui-ci était toujours étendu sur le divan, nous regardant d’un air moitié dédaigneux, moitié triomphant.

« Quittez cette chambre à l’instant, dit Glanville, ou vous vous en repentirez !

— Quoi ! un autre meurtre, sir Réginald ? dit Thornton. Non pas, non pas, je ne suis pas un moineau, pour me laisser tordre le col par des mains de femme comme les vôtres. Accordez-moi ma demande, signez le papier et je vous laisserai tranquille à tout jamais.