Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/259

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déclara que c’étaient ces soupçons qui l’avaient minée et qui avaient fini par détruire sa santé ; cet évènement tragique secoua la coupable torpeur dans laquelle était plongée sa conscience. Quand il eut dissipé sa part de l’argent volé, il tomba, comme Job avait dit, dans l’abattement et la tristesse, et souvent parla avec tant de force à Thornton de ses remords, qu’alarmé par la pusillanimité de son complice il se décida à le faire transférer dans l’espèce du tombeau où il gisait présentement.

Ici commença son véritable châtiment ; secrètement confiné dans son appartement, tout au bout de la maison, sa solitude n’était jamais interrompue que par les courtes et brusques visites de son geôlier femelle, et (ce qui était pire que la solitude même) par les rares apparitions de Thornton. Ce misérable semblait porter dans le crime une disposition qui, pour l’honneur de la nature humaine, ne se rencontre que rarement, c’est-à-dire, l’amour du mal pour le mal. Avec une malignité doublement cruelle puisqu’elle était inutile, il privait Dawson de la seule grâce qu’il implorât, de la lumière pendant les heures d’obscurité ; et non-seulement il insultait à sa couardise, mais il ajoutait encore à ses terreurs par des menaces de le réduire une bonne fois au silence.

Ces craintes avaient produit un effet si prodigieux sur l’esprit de cet homme, que la prison même lui paraissait un élysée en comparaison de l’enfer qu’il endurait. Aussi, quand sa confession fut terminée, et que je lui dis : « Si vous étiez hors de ce lieu, répéteriez-vous devant le magistrat tout ce que vous m’avez raconté ?» il sauta de joie à cette seule pensée. La vérité est qu’indépendamment de ses remords, de cette voix intérieure et impérieuse qui, dans toutes les annales du meurtre, semble pousser le criminel à l’expiation finale de son crime, il y avait encore dans son esprit un sentiment de cruelle et lâche vengeance contre son complice inhumain. Peut-être même trouvait-il une consolation à son propre destin dans l’espoir de faire retomber sur la tête de Thornton quelques-unes des tortures que le scélérat lui avait infligées.

J’avais noté sur mon carnet les principaux passages de