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CHAPITRE LXXXIV


Le jour avait déjà commencé à poindre, mais tout était encore tranquille et silencieux ; mes pas faisaient retentir le pavé solitaire d’un bruit étrange à cette heure encore muette. Néanmoins, quoique toute poursuite eût cessé depuis longtemps, je continuai toujours à courir machinalement, jusqu’au moment où, faible et hors d’haleine, je fus forcé de m’arrêter. Je regardai autour de moi, mais je ne reconnaissais rien qui me fût familier dans ces rues étroites et sales. Leurs noms même m’étaient comme une langue inconnue. Après un court repos je recommençai ma course vagabonde, et j’arrivai enfin à une ruelle appelée River Lane[1] ; le nom ne me trompait pas et après un court trajet je vis en face de moi la Tamise ; là, à mon inexprimable joie, je découvris un batelier solitaire qui me transporta immédiatement à Whitehall Stairs.

Jamais, je pense, un amoureux, au déclin de la saison, n’arriva à cet escalier dans l’agréable but d’accompagner sa propre dame, ou la femme d’un autre, au parc verdoyant de Richmond, ou aux jardins d’Hampton dorés par le soleil, avec une joie plus ardente et plus animée que celle que je ressentis lorsque repoussant le bras du rude batelier je m’élançai sur les marches bien connues. Je me dirigeai à la hâte vers cette place de jarvys[2], qui souvent a

  1. Ruelle de la rivière.
  2. Vieux fiacres.