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CHAPITRE III. — LA TYRANNIE AU QUINZIÈME SIÈCLE.

et l’en ont fait sortir finalement, l’escortant toujours et partout ; comme il se démène, vrai marchand forain, pour se faire payer sa marchandise, c’est-à-dire les privilèges qu’il vend à ses clients ; quelle pitoyable figure il fait à Rome, et comment il repasse enfin les Alpes avec son escarcelle pleine, sans avoir donné un coup d’épée ! Malgré cela, des patriotes exaltés, des poëtes, qui révalent le rétablissement de l’ancienne grandeur de l’Italie, fondaient sur son apparition de grandes espérances, qui naturellement furent ruinées par sa déplorable conduite, Pétrarque avait, dans mainte lettre, engagé l’Empereur à passer les Alpes pour rendre à Home son ancienne splendeur et pour restaurer l’empire de l’univers. Quand Charles IV fut venu ea Italie, naturelleraeat sans penser le moins du monde à d’aussi grands projets, il espéra voir ses rêves se réaliser et ne se lassa point d’entretenir le prince de ses idées ambitieuses, soit par ses discours, soit par ses lettres ; mais il finit par se détourner de lui quand il crut voir l’autorité humiliée par la soumission de Charles IV au Saint-Siège[1].

Du moins, lors de son premier voyage (1414), Sigisraond avait la bonne intention de chercher à intéresser le pape Jean XXIII à son concile ; ce fut dans cette circonstance que, l’Empereur et le Pape étant sur la grande tour de Crémone pour admirer le panorama de la Lombardie, le tyran local Gabrino Fondolo, leur hôte, eut envie de les jeter tous deux en bas. La seconde fois, Sigismond apparut tout à fait en aventurier : il ne fit acte d’Empereur qu’en couronnant le poète Beccadelli ;

    bien des faits en les présentant sous des couleurs plus sombres que ne l’était la réalité. Dans un certain passage (IV, 74), il donne de grands éloges à Charles IV.

  1. Voir Appendice no 1 à la fin du volume.