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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

qui sont armés de l’énergie et de l’intelligence nécessaires pour l’atteindre. Il n’a presque rien écrit ; il a fini par détruire des vers faits dans sa jeunesse, après les avoir gardés longtemps. Il étudiait avec ardeur, mais sans rechercher les titres, qu’il méprisait comme tout ce qui est purement extérieur ; il se lia intimement avec des maîtres, des collègues et des étudiants dont il sut conserver l’amitié. Il menait de front les exercices du corps et les travaux de l’intelligence : il excellait dans l’art de l’équilation, de la danse, de l’escrime ; il s’habillait toujours de même, hiver comme été, ne portait que des sandales même par le froid le plus rigoureux, et vivait de telle manière qu’il arriva à un âge avancé sans avoir jamais été malade. Quant à ses passions, à son goût pour le plaisir, à son penchant à la colère, il les combattit si bien qu’il resta chaste pendant toute sa vie, et que rarement il blessa quelqu’un par uue parole injurieuse.

Il commença par élever les fils et les filles de la maison régnante, et fit une véritable savante d’une des princesses confiées à ses soins ; mais lorsque sa réputation se fut répandue dans toute l’Italie et même au delà, lorsque des jeunes gens de grandes et riches familles accoururent de tous côtés, même de l’Allemagne, pour recevoir ses leçons, Gonzague lui permit de les instruire ; il alla plus loin : il prit à tâche de faire de Mantoue un centre d’éducation pour les enfants des plus nobles familles. C’est là qu’on vit pour la première fois la gymnastique et les exercices du corps entrer dans le programme des écoles et se combiner heureusement avec l’enseignement scientifique. À tous ces élèves vinrent s’en joindre d’autres, dans l’éducation desquels Viltorino reconnaissait peut-être le but le plus élevé de son existence ; c’étaient des jeunes gens pauvres, mais bien doués (ils étaient par-