Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 2.djvu/152

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qui était d’origine espagnole, avait au moins la réputation d’être amusante ; du reste, elle avait à la fois bon cœur et mauvaise langue, et plus d’une lois sa médisance, qui ne respectait rien, lui attira de fâcheuses aventures [1], À Milan, Bandello a connu la majestueuse Catherine di San Celso [2], qui était une musicienne remarquable et qui déclamait à ravir, il résulte de tout ce que nous savons, que les hommes d’esprit et les personnages considérables qui voyaient ces dames et parfois vivaient plus ou moins longtemps avec elles, voulaient qu’elles eussent en même temps rintelligence et la beauté, et que l’on traitait avec les plus grands égards les courtisanes en renom ; même après avoir rompu avec elles, on comptait avec leur opinion [3], parce que la passion, même éteinte, laissait une impression profonde dans l’âme. Mais, en somme, ces rapports ne peuvent se comparer aux relations sociales permises, officielles, et les traces qu’ils laissent dans la littérature et dans la poésie sont, en général, d’une nature passablement scandaleuse. On peut s’étonuer à bon droit que sur les six mille huit cents courtisanes que Rome comptait en 1490, par conséquent avant l’apparition de la syphilis [4], il y eût à peine une femme supérieure ; celles que nous avons nommées plus haut appartiennent à une époque postérieure. La manière de vivre, la morale et la philosophie des femmes publiques, notamment les

    Nov. 42. (Gregorovius, VIII, 278 ss.) — Arétin, dans le Ragionamémo del Zoppino, p. 827, dit d’une courtisane : Elle sait par cœur tout Pétrarque et tout Boccace, sans parler d’une quantité innombrable de beaux vers latins de Virgile, d’Horace, d’Ovide et de mille autres auteurs.

  1. Bandello, 11, 51 ; IV, 16.
  2. Bandello, IV, 8.
  3. On en trouve un exemple très-caractéristique dans Giraldi, UêOêtommiihi, VI, 7.
  4. Voir appendice n» 4.