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GADDI. — DUCCIO.

tribune de S. Miniato [a], près de Florence (1297 ?), est encore un Byzantin endurci ; le sens de la nature ne s’éveille chez lui que pour les figures d’animaux qui peuplent la vaste prairie du premier plan. (La mosaïque est aujourd’hui entièrement restaurée, en sorte que le caractère primitif s’est tout à fait perdu.) — Au contraire, la lunette de Gaddo Gaddi, à l’intérieur, avec le Couronnement de la Vierge, au-dessus du portail principal de la cathédrale [b], trahit, en dépit d’une technique absolument byzantine, l’impression profonde causée par les Madones de Cimabue. — Les mosaïques des tribunes du transept, dans la cathédrale [c] de Pise, montrent plutôt une certaine tendance vers la manière de Giotto (l’Annonciation et une Madone avec des anges).

Vers le même temps apparaît la nouvelle tendance de l’école de Sienne. À cette époque appartiennent : Diotisalvi, qui ne nous est connu que par les documents (on lui attribue deux petits tableaux de l’Académie [d], nos 16-17), et Duccio, l’auteur du grand tableau d’autel (1308-1310) aujourd’hui exposé en deux parties dans la cathédrale [e] (aux deux extrémités du transept : à gauche la Madone avec des anges et des saints ; à droite, les Scènes de la Vie du Christ, divisées en un grand nombre de petits compartiments (des peintures de predelles d’autels à la sacristie). Si la beauté individuelle était le but suprême de la peinture, Duccio eût devancé le xiiie siècle et le xive siècle, sans même en excepter Orcagna. Il doit avoir éprouvé une joie profonde le jour où, devant ses contemporains étonnés, il put, de lui—même (et sans rien emprunter, comme Niccolò Pisano, aux modèles antiques), rendre la beauté du visage humain, la grâce exquise des mouvements et des attitudes. Sa technique, cependant, est encore celle des Byzantins ; et dans ses compositions historiques, à y regarder d’un peu près, il a plutôt, par son style, rendu la vie aux motifs traditionnels des Byzantins qu’il n’en a lui-même créé de nouveaux. Il est encore permis d’attribuer avec quelque vraisemblance à Duccio : à l’Académie [f], la jolie petite Madone, si grandement conçue avec trois Franciscains à genoux (no  20) ; une Madone avec quatre saints (no  23), et un autel triptyque avec la Madone et des Scènes de la Passion, très abîme (no  24). Dans l’Opera [g], parmi les dix—huit petits tableaux qui, à l’origine sans doute, devaient faire partie du tableau de la cathédrale, les petits tableaux aux coins en diagonale sont de Duccio lui-même, les six autres ne sont que des œuvres d’atelier. La Madone avec quatre saints dans l’église de l’hôpital [h] (faussement signée : Del tempo di Matteo di Giovanni) est de même, selon toute probabilité, une œuvre authentique de Duccio. Par de telles créations, l’artiste a pour un siècle donné le ton à l’école de sa patrie.

Quant à son contemporain Ugolino, on ne saurait en Italie lui attribuer sûrement aucune œuvre, depuis qu’on lui conteste le tableau d’autel d’Orsamichele. — Segna est l’auteur d’un tableau d’autel à Castiglione Fiorentino [i].