Page:Burnett - Le Petit Lord.djvu/287

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fenêtre et regarda au dehors. Il ne semblait pas avoir d’autre idée, et tel était bien son but en effet, que de détourner ses yeux et sa pensée d’un objet qui lui était désagréable. Alors la femme, se voyant démasquée, perdit toute retenue, et se laissa aller à un de ces accès de rage dont les deux frères autrefois avaient souvent été les témoins.

Cette explosion de colère ne fit qu’augmenter les ricanements moqueurs de Dick. Il semblait prendre un grand plaisir à la voir s’y livrer et à l’entendre exhaler ses menaces en les accablant d’injures. Mais Ben ne paraissait pas y trouver la même satisfaction et demeurait le visage obstinément tourné au dehors.

« Je peux jurer devant n’importe quel tribunal, finit-il par dire à M. Havisam, que cette femme est ma femme, et je peux faire venir une douzaine de camarades qui le jureront comme moi. Son père était un honnête homme, quoique ce ne fût qu’un homme du peuple. Il vit encore et il est aussi honteux que moi-même de la conduite de sa fille. Il la reconnaîtrait bien, et il pourrait vous dire s’il n’est pas vrai que je l’ai épousée, pour mon malheur ! »

Il se décida à se retourner.

« Où est mon garçon ? dit-il en s’adressant à sa femme. Où est-il ? Je veux l’emmener ! Il est resté trop longtemps avec vous… Et moi aussi j’y suis resté trop longtemps. »

Comme il prononçait ces paroles, la porte qui conduisait à la chambre à coucher de Minna fut entr’ouverte doucement, et une tête d’enfant, probablement attiré par le bruit des voix, se glissa par l’entre-bâillement. Ce n’était pas précisément celle