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mes soirées à vous rendre compte des aventures du jour ; mais cet arrangement devient impossible : les divertissemens de cette capitale sont poussés si avant dans la nuit, que si je voulois m’occuper encore après le souper, il me faudroit renoncer entièrement au sommeil.

Nous avons passé hier une soirée des plus extraordinaires. Comme nous étions invitées à ce qu’on appelle ici un bal privé, je comptois n’y trouver qu’une douzaine de personnes : au lieu de cela, je suis tombée au milieu d’un demi-monde. Imaginez-vous deux grandes salles, remplies autant qu’elles pouvoient l’être ; dans l’une, on avoit dressé des tables à jeu pour les femmes mariées ; l’autre étoit pour la danse. Ma mère (car madame Mirvan me nomme toujours sa fille) nous dit qu’elle resteroit avec Marie et moi, jusqu’à ce que nous fussions pourvues de danseurs, et qu’ensuite elle iroit faire sa partie.

Les hommes passoient et repassoient devant nous, sembloient se dire qu’ils étoient sûrs de nous, comme si nous n’étions-là que pour attendre l’honneur, de leurs ordres. Ces messieurs se promenoient d’un air distrait et nonchalant, vraisemblablement pour nous tenir en