Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/65

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« C’est, je vous jure, la plus belle créature que j’aie jamais vue ».

Mylord se mit à rire, et avec raison. « Oui, répliqua-t-il, elle est assez jolie, et surtout très-modeste ».

« Oh ! mylord, s’écria cet extravagant, c’est un ange » !

« Un ange qui ne dit mot ».

« Comment cela se peut-il, mylord, avec une physionomie aussi spirituelle et aussi expressive » !

« Une petite idiote », ajouta Orville en secouant la tête.

« Voilà qui va bien, sur ma foi », répliqua l’autre.

Dans le même instant, cet homme odieux qui venoit de me donner tant d’inquiétude, se mêla de la conversation ; et en s’adressant respectueusement à mylord Orville, il lui dit : « Je vous demande pardon, mylord, si, comme j’ai lieu de le craindre, j’ai réprimandé tantôt, avec trop de sévérité, la dame que vous honorez de votre protection. Mais, avec d’aussi mauvaises manières, vous m’avouerez qu’on peut pousser un homme à bout ».

« Mauvaises manières ! s’écria mon champion anonyme ; cela est impossible. Un minois comme celui-là, ne