Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/78

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pied ! à moins cependant (ajouta-t-il en hésitant et en me fixant avec attention) » que ce cavalier ne soit un être de votre création » ?

J’étais honteuse au-delà de toute expression, et je ne pus rien répondre.

« Mais non, reprit-il avec chaleur, vous ne sauriez être si cruelle ! la douceur est peinte dans vos yeux. Pourriez-vous être assez barbare pour vous jouer ainsi de mon malheur » !

Je fus choquée de cette sottise, et je me détournai. Madame Mirvan s’apperçut de mon embarras, et ne sut qu’en penser ; la présence du capitaine m’empêcha de le lui expliquer. Je la priai de faire un tour de salle : elle s’y prêta, et nous nous levâmes tous. Mais le croirez-vous, monsieur ? l’inconnu eut le front de se lever en même temps, et marcha à côté de moi, comme s’il avoit été des nôtres.

« Pour le coup, dit-il, j’espère que nous trouverons l’ingrat. Est-ce celui-là » ? et il me montra un vieux boiteux ; — « ou cet autre » ? et de cette façon il fit la revue de tous les personnages âgés ou difformes de la salle. Je ne lui répondis plus rien ; et lorsqu’il vit que je m’obstinois à garder le silence, et que je dou-