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On dit de même æquum est, — erat (il serait, il eût été juste) ; longum est omnia commemorare (il serait trop long d’entrer dans tous les détails) ; hic locus est de ea re disserendi (ce serait ici le lieu de traiter cette question).

Rem. Cet usage doit d’autant moins étonner que, même en français, l’indicatif et le conditionnel ont quelquefois la même valeur : Omnibus eum contumeliis onerasti, quem patris loco colere debebas, Cic. (tu as abreuvé de tous les outrages, celui que tu devais, ou, que tu aurais dû révérer comme un père).

§ 399. SUBJONCTIF.

D’après l’idée que nous avons donnée du subjonctif (§ 43), la place de ce mode est dans les propositions subordonnées[1]. Toutefois il s’emploie sans être précédé d’un autre verbe[2].

1° Pour tenir lieu de l’impératif ; voyez le § suivant, n°2.

2° Pour indiquer une simple possibilité : Hic quærat quispiam, Cic. (ici quelqu’un pourrait demander).

3° Pour délibérer avec d’autres ou avec soi-même : Quid hoc homine faciatis ? Cic. (que feriez-vous de cet homme ?) Quid facerem ? Virg. (que pouvais-je, que devais-je faire?)

4° Pour exprimer un souhait, avec ou sans utinam : Hoc omen avertat Jupiter (puisse Jupiter détourner ce présage) ! Utinam minus cupidi vitæ fuissemus ! Cic. (plût aux dieux que nous eussions été moins attachés à la vie !)

5° Pour repousser ou pour nier quelque chose avec indignation : Egone ut prolis meæ fundam cruorem ! Sén. le tr. (moi, je verserais le sang de mes fils !)[3] Tu ut unquam te corrigas ! Cic. (toi, tu te corrigerais jamais !) Huic cedamus ! Cic. (nous céderions à cet homme !) En ce sens, on emploie toujours le présent du subjonctif, et non l’imparfait.

6° On emploie encore le présent ou le parfait de ce mode pour énoncer une opinion avec réserve et sans prendre le ton affirmatif : velim (je voudrais) ; optaverim (je désirerais) ; non hoc dixerim (je ne dirais pas) ; hoc magno mercentur Atridæ, Virg. (les Atrides vous payeraient bien cher cet avantage).

Rem. Dans toutes ces phrases, le subjonctif exprime la même idée de doute que notre conditionnel ; voilà pourquoi il est si

  1. Voyez notamment les §§ 214, 215, 223, 224, 225, 235, 255.
  2. Cf. Méth. g. § 365, ii.
  3. Ou « que je verse le sang de mes fils ! » comme Polyeucte dit dans Corneille : « Que je sois tout ensemble idolâtre et chrétien ! »