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Page:Burnouf - Méthode pour étudier la langue latine, 1843.djvu/331

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2. Certaines constructions françaises sont susceptibles de l’un et de l’autre sens ; par exemple : « Je dirai néanmoins ce que je pense, » peut signifier, « Je dirai la chose que je pense, » et alors on traduira : Dicam tamen quod sentio, Cic. ; ou, « Je dirai quelle chose je pense, quelle est ma pensée, » et l’on traduira : Dicam tamen quid sentiam.

Toutes les fois que les mots ce que seront l’équivalent de quelle chose, il y aura interrogation indirecte, et le second verbe se mettra au subjonctif : « En matière de bonne foi, il faut toujours considérer ce qu’on a pensé, et non ce qu’on a dit (quelle chose on a pensée, — on a dite), » Semper in fide, quid senseris, non quid dixeris, cogitandum, Cic.

3. La locution Nescio quis est à remarquer ; elle est considérée comme synonyme d’aliquis, et n’influe en rien sur le mode du second verbe : Nescio quis teneros oculus mihi fascinat agnos, Virg. (je ne sais quel mauvais œil fascine mes jeunes agneaux). Nescio quid produit quelquefois l’effet d’un adverbe : Nescio quid conturbatus esse mihi videris, Cic. (vous me paraissez quelque peu troublé)

§ 473. II. Avec ne, num, nonne (cf. § 467).

L’interrogation indirecte est très-souvent marquée en français par la conjonction dubitative si, placée entre deux verbes. Si l’interrogation n’a qu’un membre, on traduira si par ou par num, quelle que doive être la réponse : « On demande si l’opiniâtreté et la persévérance sont la même chose, » Quæritur idemne sit pertinacia et perseverantia, Cic. — « Tu me demandes si je t’ordonne d’aller en exil, » Interrogas me num in exsilium [ire te jubeam], Cic.

Si accompagné de ne... pas se rendra par nonne : « Vous m’aviez demandé si je ne pensais pas qu’en tant de siècles la vérité avait pu être découverte, » Quæsieras ex me nonne putarem tot sæculis inveniri verum potuisse, Cic.[1].

Rem. An, dans l’interrogation indirecte à un seul membre, comme : Quæritur an siccari palus Pomptina possit[2] (on demande si les marais Pontins peuvent être desséchés), appartient en général à une époque postérieure à Cicéron[3]. Il sera donc mieux de s’en tenir à ne ou num : Quæro feceritne, ou, num fecerit hanc rem.

  1. Cic. Acad. pr. II, 24.
  2. Quintil. III, 8, 16 ; cf. V, 14, 13.
  3. Le peu d’exemples que l’on en trouve dans Cicéron sont contestés. Les deux suivants ne peuvent pas l’être : Quis scit an adjiciant hodienæ crastina summæ tempora di superi ? Hor. Deinde, an omnino mittendus esset, mota est consultatio, Tit. Liv. XXXV, 42. Quant au vers de Phèdre, interrogavit an bove esset latior, il signifie : « La grenouille demanda si elle n’était pas plus grosse que le bœuf, » et il doit s’expliquer comme nescio an, § 475.