Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/218

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Quelque temps après que les princes furent en prison, madame la Princesse douairière eut permission

    Le Père Lelong (n. 22,711 et n. 23,096) et le catalogue de la Bibliothèque nationale (Histoire, t. 2, n. 1682) indiquent diverses pièces mises alors sous son nom par les fabricants de livres politiques. Mais plus qu’habile elle avoit été et elle étoit restée belle. Croyons-en Voiture :

    La belle princesse n’est pas
    Du rang des beautés d’ici-bas,
    Car une fraischeur immortelle
    Se voit en elle.

    M. Cousin (Longueville, 2e édit., p. 180) cite des vers de fête qui lui furent adressés. Le titre en est un peu bien pompeux : La Vie et les miracles de sainte Marguerite-Charlotte de Montmorency, princesse de Condé, mis en vers à Liancourt.

    Jamais sainte ne fut canonisée si facilement. Madame la Princesse douairière étoit d’abord la fierté en personne. Madame de Motteville (t. 4, p. 91) est bien informée : « Cette princesse étoit dans un âge qui pouvoit encore lui faire espérer une longue suite d’années ; elle paroissoit saine, elle avoit encore de la beauté, et l’on peut croire que l’amertume de sa disgrâce contribua beaucoup à sa fin. Elle étoit un peu trop fière, haïssant trop ses ennemis et ne pouvant leur pardonner. Dieu voulut sans doute l’humilier avant sa mort pour la prévenir de ses graces et la faire mourir plus chrétiennement. »

    Passe pour l’arrogance. Madame la princesse étoit une Madeleine non repentie, et quelle Madeleine pour la grace, pour la pénitence, pour la béatification ! Dans l’Église ce n’est pas l’Église elle-même, l’épouse du doux Jésus, qu’elle avoit aimée. Madame de Motteville (t. 4, p. 94) garantira ce qu’on avance : « Madame la Princesse avoit été fortement occupée de l’amour d’elle-même et des créatures. Je lui ai ouï dire, un jour qu’elle railloit avec la reine sur ses aventures passées, parlant du cardinal Pamphile, devenu pape, qu’elle avoit regret de ce que le cardinal Bentivoglio, son ancien ami, qui vivoit encore lors de cette élection, n’avoit point été élu en sa place, afin, lui dit-elle, de se pouvoir vanter d’avoir eu des amants de toutes conditions, des papes, des rois, des cardinaux, des princes, des ducs, des maréchaux de France, et même des gentilshommes. »