Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/383

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Amans pleins de langueur, ne changez pas les vôtres
Avec les gens de feu ; vous perdrez au retour.
De ceux-ci la chaleur a plus de violence,
Mais d’ordinaire ils ont moins de persévérance,
Et, quand ils aimeroient aussi fidèlement,
Toujours font-ils l’amour moins agréablement.
Je leur conseillerois, en changeant leur nature,
De prendre, afin de plaire en de certains momens,
De la langueur au moins le ton et la figure :
Car, en se contraignant dans les commencemens,
Enfin ils pourroient fort bien prendre
Et l’air et la manière tendre.

Sçavoir s’il est vrai qu’un amant ne soit jamais content.

Lorsque l’on commence d’aimer,
Pour l’objet aimé l’on soupire ;
Si tôt qu’on a pu l’enflammer,
La crainte de le perdre est un cruel martyre :
De sorte qu’il est vrai de dire
Qu’on n’est jamais content quand on est amoureux,
Mais que qui n’aime pas est encor moins heureux.

Sçavoir si le désir de plaire n’est pas une suite du dessein d’aimer.

Vous voulez qu’on vous trouve belle,
Cependant vous êtes cruelle
Et vous nous assurez qu’on ne peut vous charmer ;
Je ne vous crois pas trop sincère :
Car, enfin, lorsque l’on veut plaire,
C’est signe que l’on veut aimer.