Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/439

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

elle lui vaut beaucoup. Il n’y fait pas un pas que ce ne soit patrouille, et, s’il avoit manqué à coucher une nuit sur le rempart, il n’auroit pas le lendemain de quoi dîner, et le second jour il n’auroit pas de chemise. C’est le lieu du monde où l’on fait le mieux l’exercice ; mais aussi c’est le lieu ou l’on est le mieux payé.

De là vous venez à

Cominges[1], Petite ville dont les maisons sont peintes au dehors, de sorte qu’elle paroît nouvellement bâtie, quoiqu’elle soit assez ancienne. Le gouverneur d’aujourd’hui est un vieux satrape de Ruffie[2] qui ne la gouverne que par commission, et qui, à cause de son âge, est toujours à la veille d’être dépossédé. J’ai ouï dire à des gens qui y ont été que la principale porte de la ville est si proche d’une fausse porte qui conduit à un cul-de-sac que bien souvent on prend l’une pour l’autre.

À deux lieues de là vous rencontrez

Le Tillet[3], grande ville ouverte de tous côtés. Le peuple en est grossier, le terroir gras et assez beau ; cependant on remarque qu’un homme raisonnable n’y a jamais pu demeurer deux jours. Mais, comme il y a dans le monde plus de sots que d’honnêtes gens, le lieu n’est jamais vide.

  1. Sibille-Angélique-Émilie d’Amalby, mariée en 1643 à Cominges, cousin de Guitaut.
  2. Le maréchal du Plessis, dit la Clef.
  3. Fille aînée du président Bailleul, mariée à N. Girard, seigneur du Tillet.