Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/48

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isérable bourgeois, qui ne peut jamais être craint que par l’audace que vous lui donnez ? Si vous n’en rougissez, Madame, j’en rougis pour vous et pour moi, et, de peur de mériter cette honte dont vous voulez m’accabler, je vais faire un effort sur mon amour pour ne vous plus regarder que comme une infâme.

    pas de la plus haute noblesse. On juge par là ce qu’il pensoit des gens d’affaires. Bartet, secrétaire du roi, lui ayant déplu, voyez la hardiesse avec laquelle il le fait arrêter et raser d’un côté du visage, barbe et cheveux ! (Sévigné, juin 1655 ; Montp., t. 2, p. 488, t. 3, p. 22.) Cela ne parut pas trop étonnant. Encore fit-il exiler sa victime ! Les dames sourirent. Belle prouesse de prince chimérique ! Mademoiselle de Montpensier (t. 3, p. 128) dit que « c’étoit un garçon plein d’honneur et incapable d’aucune mauvaise action. » Elle dit cela à la date de 1657, lorsque arriva l’affaire Montrevel. Ce Montrevel, se battant en duel avec Candale, est tué par derrière d’un coup d’épée que La Barte, un des suivants du grand roi de la mode, lui donne inopinément. Cette fois on crie : Il faut donner une garde du corps à Candale pour le protéger. Son courage, toutefois, n’est pas mis en doute (Voy. Motteville, t. 3, p. 293) ; mais la fierté de son rang lui monte bien vite à la tête. Le pauvre Bartet n’avoit pas été bien audacieux ; il n’avoit rien imaginé ; il avoit dit tout bas, et pour se venger de se voir prendre la marquise de Gouville, que Candale n’étoit peut-être pas un amant d’une énergie incontestable. De fait, Candale s’en faisoit accroire, comme Guiche, comme d’autres. Soyecourt étoit moins galant de mine, mais c’étoit un autre homme. Au surplus, ce n’est pas pour cela que je lui chercherai querelle : c’est parceque je le suppose moins doucereux qu’on ne le croyoit. Qu’est-ce que cette note de Tallemant ? (T. 4, p. 355). « Madame Pilou étoit fort embarrassée d’un certain brave, nommé Montenac, qui vouloit enlever madame de la Fosse. Un jour, ayant trouvé feu M. de Candale : Monsieur, lui dit-elle, vous menez tous les ans tant de gens à l’armée, ne sçauriez-vous nous desfaire de Montenac ? Tous les ans vous me faittes tuer quelques-uns de mes amys, et celuy-là revient tousjours ! — Il faut, respondit-il, que je me desfasse de deux ou trois hommes qui m’importunent, et après je vous desferay de cestuy-là. » N’y a-t-il pas là de quoi le condamner ?