Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/62

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grandes alarmes pour avoir rien à ménager, mais je crains d’apprendre plus que je ne voudrois sçavoir. Voilà l’état où je suis et où je serai jusqu’au premier ordinaire, si j’ai la force de l’attendre. Ce qui redouble mes inquiétudes, c’est que vous m’avez si souvent promis de m’envoyer exprès des courriers à toutes les affaires extraordinaires, que je prends en mauvaise part de n’en avoir point eu à celle-ci.


Pendant que la comtesse lisoit cette lettre avec peine, car elle en étoit touchée, madame d’Olonne fondoit en larmes ; après l’avoir lue elles furent toutes deux quelque temps sans parler. « Je n’en lirai plus d’aujourd’hui, lui dit la comtesse, car, puisque cela me donne de la peine, il vous en doit bien donner davantage. — Non, non, reprit madame d’Olonne ; continuez, je vous prie, ma chère : cela me fait pleurer, mais cela me fait souvenir de lui[1]. » La comtesse ayant ouvert une autre lettre, elle y trouva ceci :


LETTRE.

Eh quoi ! ne me laisserez-vous jamais en repos ? serai-je toujours dans des craintes de vous perdre, ou par votre mort, ou par votre changement ? Tant que la campagne dure je suis dans de perpétuelles alarmes ; les ennemis ne tirent pas un coup que je ne m’imagine que ce soit à vous. J’apprends ensuite que vous perdez un combat sans savoir ce que vous êtes devenu, e

  1. Ceux qui s’imaginent que l’Histoire amoureuse est un livre ordurier seront bien étonnés en lisant toutes ces pages délicates.