Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/179

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pour me ranger du côté de ceux qui voudroient vous nuire. Ne craignez rien, poursuivit-elle en rougissant, de tout ce que je vous viens de dire de votre billet : personne ne l’a vu que moi. J’ai voulu vous donner d’abord cette allarme pour vous étonner. Croyez que je ne saurois vous mal traiter sans être infidèle aux sentimens de mon cœur les plus tendres. J’ai remarqué tout ce que votre passion et votre respect vous ont fait faire, et, tant que vous en userez comme vous devez, je vous sacrifierai bien des choses et je ne vous livrerai jamais à personne. — Est-il possible, lui dis-je, que Votre Altesse ait tant de bonté, et que la disproportion qui est entre nous de toute manière vous laisse abaisser jusqu’à moi ? C’est à cette heure, Madame, que je connois que j’ai de grands reproches à faire à la nature et à la fortune, de ce qu’elles m’ont refusé de quoi offrir à une personne de votre mérite et de votre rang. Mais, Madame, si un zèle ardent et fidèle, si une soumission sans réserve vous peut satisfaire, vous pouvez compter là-dessus et en tirer telles preuves qu’il vous plaira. — Comte, répondit-elle, j’y aurai recours quand il faudra ; soyez persuadé que, si je puis quelque chose pour votre fortune, je n’épargnerai ni mes soins ni mon crédit. — Ah ! Madame, lui dis-je, jamais pensée ambitieuse ne se mettra avec ma passion. — Hé bien, repartit-elle, si pour vous satisfaire il faut faire quelque chose pour vous, on vous permet de croire qu’on vous aime. »

« Et alors, voyant que Montalais n’étoit plus dans la chambre, je me laissai aller à ma joie, et, à genoux comme j’étois, je pris une des mains