Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/252

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le terme expiroit [1], notre comte ne manqua pas d’aller chez Mademoiselle, et son impatience l’y fit même aller beaucoup plus matin qu’à son ordinaire, chose qu’il dit à cette princesse après l’avoir saluée : « Enfin, Mademoiselle, voici ce jour tant désiré arrivé, auquel je dois recevoir tant de joie. Je ne pense pas, Mademoiselle, que Votre Altesse Royale se dédise de sa parole ; elle me l’a promis trop solennellement

  1. Le récit de Mademoiselle diffère encore de celui-ci en ce qu’il retire à Lauzun l’initiative qu’on lui prête ici :
    « Lorsque nous fûmes retournés à Saint-Germain, je vis M. de Lauzun sur la porte ; je lui dis, comme je passois : « J’ai rompu l’affaire de Monsieur. Ne voulez-vous pas me parler ? Il me semble que j’ai beaucoup à vous dire. » Il me répondit d’une manière gracieuse : « Ce sera quand vous voudrez. » Je lui dis de se trouver le lendemain chez la Reine. Il fut ponctuel à me venir écouter à l’heure que je lui avois marquée. Je lui rendis compte de tout ce que j’avois fait… Je lui demandai s’il n’étoit pas temps de reprendre mon autre affaire… Il me répondit qu’il étoit obligé de me dire de ne rien presser…
    « Je suis naturellement impatiente ; je souffrois avec peine les longueurs d’une affaire qui m’occupoit assez fortement pour troubler mon repos. Je liai une autre conversation avec M. de Lauzun ; je lui dis qu’absolument je voulois exécuter mon dessein, et que j’avois pris celui de lui nommer la personne que j’avois choisie. Il me répondit que je le faisois trembler. Il me disoit : « Si, par caprice, je n’approuve votre goût, résolue et entêtée comme vous êtes, je vois bien que vous n’oserez plus me voir. Je suis trop intéressé à me conserver l’honneur de vos bonnes grâces pour écouter une confidence qui me mettroit au hasard de les perdre : je n’en ferai rien, je vous supplie de tout mon cœur de ne me plus parler de cette affaire. » Plus il se défendoit de s’entendre nommer, plus j’avois envie de le faire ; comme il s’en alloit toujours lorsqu’il m’avoit précisément répondu ce qu’il avoit à me dire, j’avoue que j’étois fort embarrassée moi-même de lui dire : C’est vous. » (Mém. de Montp., édit. citée, t. VI, p. 126-129.)