Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 2, éd. Boiteau, 1857.djvu/308

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pas de le traiter avec la même rigueur, et lui fit seulement considérer qu’elle ne pouvoit souffrir, sans blesser sa vertu, qu’un autre homme que son mari eût de l’affection pour elle.

Elle l’obligea ensuite de se retirer, appréhendant le retour de M. de Bagneux, qui ne lui avoit pas donné peu d’inquiétude, de quoi elle avoit eu un extrême sujet. Ayant vu qu’elle s’étoit retirée, il avoit quitté le jeu presqu’en même temps que le chevalier de Fosseuse étoit sorti de chez madame de Vandeuil ; mais, par un bonheur extraordinaire, craignant de la réveiller, il alla dans une chambre proche de celle où elle étoit couchée.

Lorsqu’il rentra, ses gens fermèrent les portes aussitôt qu’ils l’eurent vu rentré. Le chevalier de Fosseuse, les ayant trouvées fermées, fut étrangement embarrassé. Il se les fit ouvrir, comme s’il fût venu de quitter M. de Bagneux, lequel étoit entré dans la chambre de madame de Bagneux un instant après que le chevalier de Fosseuse en étoit sorti. M. de Bagneux, ayant entendu rouvrir les portes comme il se couchoit, demanda le lendemain à ses gens à qui ils les avoient ouvertes. Sur quoi ils lui dirent ce que le chevalier de Fosseuse leur avoit dit, et, quoique aucun d’eux ne lui pût dire qui il étoit, ni presque même comment il étoit fait, il eut des soupçons qui ne lui donnèrent pas peu d’inquiétude. Comme il pouvoit douter que sa femme l’aimât lorsqu’il l’avoit épousée, il doutoit toujours d’en être aimé, ce qui empêchoit que sa satisfaction ne fût tout à fait tranquille, et lui avoit donné un extrême penchant à la jalousie.