Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/106

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les serviteurs, c’est lorsqu’ils s’acquittent bien de leur devoir ; et, pour me servir du proverbe, bon valet fait bon maître.

« 12. Soyez contente de votre condition, car qui ne se contente pas d’une honnête fortune se donne souvent bien de la peine pour la rendre moindre en tâchant de l’agrandir.

« 13. Ne vous empressez pas à savoir le secret d’autrui ; soyez fort réservée à communiquer les vôtres : vous n’en êtes plus maîtresse dès lors que vous en avez fait confidence à quelqu’un, et votre exemple justifie l’infidélité qu’on pourroit vous faire en le communiquant à un autre.

« 14. Encore une fois, défiez-vous des cajoleurs et des flatteurs : les uns et les autres visent par le vent de leurs paroles à tirer l’argent de votre bourse et à vous ravir l’honneur. Enfin, l’infection de la peste n’est pas tant à craindre pour le corps que le poison des mauvaises compagnies, et qui se sert de discours trop étudiés pour nous persuader un crime emploie un poignard parfumé pour nous percer le cœur.

« Voilà, Guillemette, ce que j’avois à vous dire, et que je vous prie de bien retenir dans votre cœur ; et, crainte que vous ne l’oubliiez, je l’ai succinctement rédigé par écrit : le voilà, ayez-en soin, et le lisez souvent. »

Guillemette le lui promit, après quoi elles se reposèrent jusques au matin, que sa dame ne la voulut point quitter que pour se mettre dans le carrosse. Ainsi, nos amants ne purent se dire d’autres adieux que dans les termes généraux. Et notre marquis, ayant demeuré là quelque temps, prit congé, et se retira à une de ses