Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/132

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pas peu à la tenir toujours dans le même sentiment, où elle ne demeura pas longtemps, car il arriva entre eux une petite rupture. Sa vieille se remit aux champs pour raccommoder leur affaire ; mais Guillemette demeura ferme dans sa résolution, et jura de ne le voir ni l’entendre jamais. Lorsque le pauvre Scarron sut cela, il en fut au désespoir, et encore plus de ce qu’elle avoit rebuté toutes ses lettres. Il étoit presque à bout de son rôle, aussi bien que sa confidente ; mais comme il avoit infiniment de l’esprit, il se souvint

    à en juger par l’événement. Mais aussi, quelle apparence y avoit-il qu’une jeune fille dût troubler l’esprit d’un vieil garçon ?…

    Tandis que, la cuisse étendue,
    Dans un lit toute nue
    Vous reposez votre corps blanc et gras
    Entre deux sales draps,
    Moy, malheureux pauvre homme,
    Sans pouvoir faire un somme
    Entre mes draps, qui sont sales aussy,
    Je veille en grand soucy.

    Tout cela pour vous aimer plus que je ne pensois. La male peste ! que je vous aime ! et que c’est une sottise que d’aimer tant ! Comment, vertu de ma vie ! à tout moment il me prend envie d’aller en Poitou, et par le froid qu’il fait ! N’est-ce pas une forcenerie ! » (Dernières œuvres, t. 1, p. 23.) La troisième est datée du 12 novembre 1659. Scarron écrit à M. de Villette : « Madame Scarron est bien malheureuse de n’avoir pas assez de bien et d’équipage pour aller où elle voudroit, quand un si grand bonheur lui est offert que celuy d’estre souhaitée à Brouage par une mademoiselle de Mancini… J’espère qu’elle se r’acquittera d’une si grande perte quand la cour sera retournée à Paris… Paris est désert autant que votre Brouage est remply. Je ne m’en apperçois point dans nostre petite maison. On fait dire tous les jours aux princes, ducs et officiers de la couronne qu’on ne voit personne, et l’ambition d’être admis dans notre petite société commence à être grande et à s’échauffer furieusement dans la cour et dans la ville… »