Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/175

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Sur cet intervalle, une femme de chambre vint dire à madame de Maintenon que madame la princesse de Conti[1] venoit lui rendre visite ; laquelle se leva aussitôt, et après lui avoir fait donner un fauteuil, chacune reprit sa place. Cette visite fut causée en suite d’une collation que monseigneur le dauphin[2] avoit donnée les jours précédents à madame de Conti, où, après quelque raillerie, madame de Conti porta à monseigneur la santé de la bonne vieille sa belle-mère. Le Dauphin, en faisant raison, porta la santé du bon-homme. [Mais comme il y a toujours des esprits qui tâchent de faire leur fortune aux dépens d’autrui, cette petite galanterie ne manqua pas d’être rapportée dès le même jour à madame de Maintenon, qui de même suite le dit au Roi. Quelques jours après, Monseigneur étant à table, le Roi ayant un plat devant lui d’un ragoût que le Dauphin aimoit, le Roi le lui fit mettre devant. Monseigneur en ayant mangé d’un grand appétit, le

  1. La princesse de Conti, Marie-Anne de Bourbon, étoit la fille légitimée de Louis XIV et de mademoiselle de La Vallière. Née en octobre 1666 (voy. t. 2, p. 46), elle épousa, en 1680, Louis-Armand de Bourbon, prince de Conti, fils d’Armand, prince de Conti, et d’Anne-Marie Martinozzi. Madame de Conti perdit son mari le 9 novembre 1685. Celui-ci étoit mort en disgrâce, et madame de Conti elle-même étoit mal vue de Louis XIV, à cause, dit Dangeau, d’une lettre qu’elle avoit écrite en l’absence de son mari (Journal, t. I, p. 221).
  2. Il s’agit ici du fils de Louis XIV et de Marie-Thérèse ; le fils de ce premier dauphin porta ensuite le même titre. Sur ce titre de monseigneur appliqué au dauphin, voyez le commentaire de Saint-Simon sur le Journal de Dangeau, t. 1, p. 431 ; et sur l’anecdote elle-même, voyez Saint-Simon.