Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/255

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avoit remarquées. Le maréchal, qui s’aperçut de sa surprise, eut peur qu’il ne voulût enfiler la porte, et, pour le prévenir, y courut avec précipitation ; mais, n’ayant pas la jambe sûre, il tomba et se fit beaucoup de mal. Gendarme, qui vit bien que, quoiqu’il n’eût pas tort, tout alloit tomber sur lui, prit ce temps-là pour s’échapper ; ce qui mit le maréchal dans une furieuse colère. Il jura qu’il le feroit pendre, ce qui rassura la Du Mesnil, qui avoit eu peur d’abord qu’il n’eût plus de créance en lui qu’en elle.

Elle lui donna la main pour se relever, et quand il eut repris haleine il lui avoua franchement ce qui s’étoit passé et lui demanda pardon de son soupçon. Comme elle le vit en si beau chemin, elle lui fit une forte réprimande, lui demanda si c’étoit là la récompense de ce qu’elle faisoit tous les jours pour lui, et n’oublia rien de ce qui pouvoit lui prouver son innocence et engendrer en lui un extrême repentir.

Il lui en donna toutes les marques qu’elle pouvoit souhaiter ; mais rien ne la persuada tant qu’un cierge d’une livre qu’il envoya quérir à l’heure même pour le porter aux Quinze-Vingts, en reconnoissance, disoit-il, de ce que Dieu avoit permis qu’il eût découvert la méchanceté de Gendarme ; car, quoi qu’il fît tous les jours une offrande de même nature à cette église, comme celle-ci étoit plus forte de moitié que les autres, elle jugea qu’il étoit véritablement touché.

Pendant que le maréchal se reposoit tranquillement à l’ombre de sa bonne fortune, le duc de Sault songeoit à rétablir sa réputation auprès de madame de Lionne. Cependant, quelque confiance