Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/334

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passage du Rhin[1], elle eut regret d’avoir refusé un homme qui lui pouvoit être utile de plus d’une manière, après la perte qu’elle avoit faite. Tous ceux qui savoient son intrigue avec ce prince trouvèrent étrange qu’elle reçût si indifféremment la nouvelle de sa mort, car elle fut aux Tuileries un jour après, et on l’y vit rire à gorge déployée. La comtesse de Nogent n’en usa pas de même, elle en pensa mourir de douleur[2] ; mais comme elle avoit perdu son mari dans la même occasion, ce lui fut un prétexte pour pleurer tout à son aise et sans qu’on y pût trouver à redire.

Bechameil, étant défait d’un rival si dangereux, trouva des facilités à son dessein plus grandes qu’il n’auroit osé espérer : car la maréchale, craignant qu’il ne se fût rebuté par ses refus, le prévint par une lettre fort obligeante. Elle étoit conçue en ces termes :

Lettre de la Maréchale de la Ferté a M. de Bechameil, secrétaire du Conseil.


Tout le monde veut que j’aye beaucoup perdu en perdant le duc de Longueville, et qu’il m’aimoit assez pour le devoir regretter. C’est une étrange chose qu’on

  1. Voy. ci-dessus t. 2, p. 412.
  2. Madame de Nogent, sœur de Lauzun, n’étoit pas la seule des femmes qui formoient une sorte de cour auprès du jeune duc de Longueville. Madame de Thianges, madame d’Uxelles et beaucoup d’autres, dit Mademoiselle de Montpensier, étoient fort de ses amies. (Voy. ci-dessus t. 2, p. 412-413, note.) — Diane-Charlotte de Caumont-Lauzun, née en 1632, étoit mariée depuis neuf ans environ (28 avril 1663) à Arnauld de Bautru, comte de Nogent. Elle avoit quarante ans à l’époque du voyage de Flandre. Elle vécut jusqu’en 1720, atteignant ainsi sa quatre-vingt-huitième année.