Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/346

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survenues en si peu de temps. Comme tout le monde y étoit bien venu pour son argent, les fripons y furent comme les honnêtes gens ; et un nommé Du Pré, qui étoit du premier rang, lui ayant insinué qu’il n’y avoit que manière en ce monde de se tirer d’affaire, on n’y joua pas plus sûrement que dans tous les autres endroits de Paris, où c’est autant de coupe-gorge. Cela ayant été reconnu de la plupart de ceux qui n’étoient pas du calibre de Du Pré, on cessa d’y aller, et, l’avantage qui lui en revenoit ayant cessé par conséquent, elle fit venir dans sa maison un certain nombre de femmes choisies, afin que les jeunes gens, attirés par le bruit de leur beauté ou de leur esprit, fussent induits à la venir voir. Cependant elle y établit un jeu épouvantable, où toutes sortes de friponneries furent mises en usage, pour lui donner de quoi subsister. Ses parties furent dressées particulièrement contre les étrangers de qualité, qui, n’ayant pas encore pris langue, se croyoient trop heureux de se venir ruiner chez elle. Une de ses plus confidentes parmi toutes ces dames fut la marquise de Royan[1], et il est inconcevable combien elles en firent avaler toutes deux à toutes sortes de gens. Cependant un officier suisse qui y avoit perdu le fonds et le tréfonds, et qui avoit remarqué

  1. Yolande-Julie, fille de Louis II de La Trémouille, premier duc de Noirmoutier, et de Renée-Julie Aubery, qu’il avoit épousée en 1640, épousa, le 31 décembre 1675, François de la Trémouille, marquis de Royan, grand sénéchal de Poitou et gouverneur de Poitiers. Celui-ci étoit fils de Philippe de La Trémouille, et, par conséquent, frère de ce Louis de La Trémouille, comte d’Olonne, qui avoit épousé la sœur de la maréchale de La Ferté.