Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/377

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M. de Roquelaure, tout raffiné courtisan qu’il étoit, crut la chose faite après un accueil si favorable. Mais M. le chancelier étoit trop sage pour donner sa petite-fille à un homme aussi débauché qu’étoit le marquis de Biran, et, ayant peur que le duc d’Aumont ne se laissât surprendre par les grands biens qui sembloient ne lui pouvoir manquer, il lui envoya dire la conversation qu’il avoit eue avec le duc de Roquelaure, et qu’il insistât à ce que son fils fût duc avant que de rien conclure. Le duc de Roquelaure étant allé voir le duc d’Aumont, fut fort surpris de cette difficulté, qu’il lui mit d’abord en avant. Toutefois, espérant que M. le chancelier l’y serviroit, il s’en fut le trouver, et lui dit qu’il attendoit ce service de son amitié ; mais M. le chancelier, traitant la chose de bagatelle, lui dit qu’il n’avoit qu’à en parler lui-même au Roi, qu’il la lui accorderoit en même temps ; que s’il s’excusoit de le faire, ce n’étoit qu’à cause de toutes les grâces qu’il lui faisoit, et de peur de paroître insatiable, si, après toutes celles qu’il avoit reçues, il lui en demandoit encore de nouvelles.

C’est ainsi que le chancelier renvoya adroitement l’éteuf au duc de Roquelaure, lequel, pour un Gascon, donna si grossièrement dans le panneau, qu’il s’en fut dès le lendemain au lever du Roi. Mais ce prince, qui avoit mille sujets de ne pas vouloir de bien au marquis de Biran, lui dit, d’abord qu’il eut ouvert la bouche, qu’il étoit fâché de ne lui pouvoir accorder ce qu’il demandoit ; que la conduite de son fils en étoit cause ; que, s’il avoit de l’esprit, il ne l’employoit qu’à