Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/416

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Vous avez tort, lui dit-il, de m’accuser de penser à d’autres qu’à vous. Si la duchesse d’Aumont a quelque intrigue, ce n’est pas moi, et tout ce que je vous puis dire, c’est que, si vous me voyez en l’état où je suis, c’est vous qui en êtes cause, et qui… » Elle ne lui laissa pas le temps d’achever, et reprenant la parole avec véhémence, et même avec quelque sorte d’aigreur : « Quoi donc ! lui dit-elle, ce n’est pas assez de l’outrage que vous me faites si vous n’y joignez le plus sanglant reproche qui se puisse faire à une femme ? Enfin, c’est donc manque de charmes que vous vous trouvez aujourd’hui impuissant, et vous avez si peu de considération pour moi que de me l’oser dire à moi-même ? — C’est mal expliquer ma pensée, répondit Caderousse, et ce que j’ai voulu dire n’est pas ce que vous dites. C’est la jalousie qui fait l’effet que vous voyez, et vous n’auriez pas à l’heure qu’il est à me reprocher mon impuissance, si, lorsque je me sentois prêt à vous donner des marques d’un assez bon tempérament, je ne me fusse ressouvenu d’une certaine robe de chambre qu’on m’a montrée à l’armée, et que le prince de Courtenay[1] m’a fait voir comme venant de vous. — Que voulez-vous dire par là ? interrompit la marquise de Rambures. — Qu’en amour comme en ambition, répondit Caderousse, on ne souffre pas volontiers de concurrent. Vous ne lui avez fait présent de cette robe de chambre que parce que vous l’aimiez ; et le moyen de croire que vous l’ayez oublié, lui qui a de si

  1. Voy. t. 2, p. 88.