Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/444

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et le duc fut obligé de lui donner un soufflet pour se dégager de ses mains.

Il sortit ensuite, pour n’être pas obligé de recommencer un combat si indécent. Mais à peine fut-il hors de sa chambre, que, presque aussi tranquille que si de rien n’eût été, elle ne songea qu’à faire tirer les meubles d’un logis au cul-de-sac de Saint-Thomas du Louvre qu’il lui avoit meublé, et où ils se voyoient souvent. Elle monta donc promptement en carrosse ; mais le duc, après s’en être allé à l’hôtel de Condé, ayant fait réflexion qu’elle aimoit assez son profit pour se les vouloir approprier, s’y en fut lui-même et la trouva déjà qui déménageoit. Ce fut un sujet de nouvelle querelle, mais elle ne dura pas tout à fait tant que l’autre, car la comtesse, ne se tenant pas si forte en cet endroit qu’elle faisoit chez le maréchal son père[1], fut obligée de filer doux, bien fâchée néanmoins qu’une si bonne proie lui échappât.

Ce fut ainsi que finit l’intrigue du duc d’Enghien et de la comtesse de Maré : ce qui obligea le maréchal de Grancey de retrancher une partie de ses domestiques, pour l’entretien desquels le duc fournissoit à l’appointement ; car ce bonhomme, qui n’avoit pas l’esprit trop bien timbré, s’étoit mis en tête que le duc d’Orléans[2], qui aimoit sa cadette[3], l’épouseroit, et que le duc d’Enghien

  1. Le maréchal de Grancey.
  2. Philippe de France, duc d’Orléans, frère de Louis XIV, né le 22 septembre 1640. Il étoit veuf alors de madame Henriette, dont il a été tant parlé dans le second volume de cet ouvrage. (Voy. ci-dessus, p. 239, et lisez duc d’Orléans, et non duc d’Anjou.)
  3. Elisabeth de Grancey, dame d’atours de Marie-Louise d’Orléans,