Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/56

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et que de sa vie il n’avoit conçu tant d’amour pour une personne comme il en ressentoit pour elle.

L’après-dînée, notre malade se porta mieux ; elle reçut plusieurs visites, et jamais reste de journée n’a été si bien employé que le fut celui-là : on y parla de nouvelles galantes et des pièces d’esprit qui étoient les plus récentes ; et comme c’étoit à qui contribueroit davantage au divertissement de la belle, Mme D. A.[1], qui avoit été de la chasse, tira un écrit de sa poche et en fit la lecture assez vite pour qu’aucun ne pût en pénétrer le sens. C’étoit une énigme qu’elle dit qui lui étoit tombée par hasard entre les mains ; qu’elle en ignoroit le mot, mais qu’elle croyoit qu’elle ne pouvoit être que noble et relevée, puisqu’il y étoit parlé du Roi ; la voici :


ÉNIGME.

Tantôt je suis ouvert, tantôt je suis fermé,
Selon qu’il plaît au roy le plus puissant qu’on voie.
Je ressens la douleur et je donne la joie.
Je suis ou peu s’en faut de tout le monde aimé.
Mon frère fort souvent contre moi animé[2],
Vient fouler sans respect mon corail et ma soie ;
Il me perce le sein, mais aussi je le noie,
Et éteins tous les feux dont il s’étoit armé.
Je suis petit de corps, mais je donne la vie ;

  1. Madame la duchesse d’Arpajon. (Note de l’édition de 1740.)
  2. Les éditions modernes donnent seule cette variante, qui supprime l’hiatus :

    …… de transport animé.