Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/57

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Plus je suis à couvert, plus je reçois de pluie ;
J’ai la langue en ma bouche, et je ne parle point.
Mon nom est trop caché pour le pouvoir connoître ;
Un ombrage à vos yeux m’empêche de paroître :
Ne vous rompez donc plus la tête sur ce point.

Devant que l’énigme passât de main en main, le Roi en voulut faire la lecture. Bien qu’il ait de l’esprit infiniment, il ne l’eut pas pour lors assez pénétrant pour en découvrir le sens. Sa maîtresse fut plus spirituelle et entra d’abord dans la pensée de celui qui l’avoit composée ; mais, bien loin de la déclarer, elle dit, pour dégoûter les autres d’une recherche plus exacte, que cela ne méritoit pas qu’on s’y appliquât davantage. Cela donna à penser à une de la compagnie, qui, faisant une seconde lecture de l’ouvrage, y connut ce qui y étoit mystérieux ; elle eut pour lors plus d’esprit que de jugement, car elle ne put s’empêcher de dire tout haut qu’on ne devoit pas être surpris si le véritable sens de l’énigme étoit si difficile à trouver, puisqu’il n’y avoit que le Roi qui en eût la véritable clef. Cette parole ne produisit pas un effet tel que celle qui l’avoit imprudemment lâchée auroit souhaité ; le Roi et toutes celles qui composoient le cercle devinèrent facilement qui étoit celle qui étoit sur jeu. On s’enquit de Mad. D. A. de qui elle avoit eu ces vers, on fit toutes les perquisitions possibles pour en apprendre l’auteur ; mais Mad. D. A., qui étoit innocente du stratagème, s’en excusa facilement et dit qu’elle l’avoit trouvée sur sa table à son lever, sans savoir par qui ni comment elle y avoit été