Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/63

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pars pour passer les jours entiers à vous dire que je vous aime. Ah ! qu’il est doux seulement d’y penser, lorsqu’on aime un enfant si aimable, et qu’on est certain d’en être aimé !

Le Roi suivit de bien près cette lettre, et partit de Versailles le jour d’après celui qu’elle fut envoyée, pour aller rassurer sa belle. « Ah ! que je suis heureuse, mon cher Prince, lui dit-elle en l’abordant avec un air engageant, de vous voir ainsi de retour ! Ah ! que l’éloignement de ce qu’on aime est une chose difficile à supporter ! — Je l’ai bien éprouvé, ma chère enfant, lui dit le Roi en l’embrassant, et ce n’est que l’amour extrême que je vous porte qui m’a si tôt rappelé et qui n’a pas pu me permettre de vivre un moment sans vous. » Cette entrevue fut accompagnée d’autant de marques de joie que si c’eût été la première : nos amans ne pouvoient assez se regarder, et les plaisirs qui suivirent ces transports furent goûtés de l’un et de l’autre dans toute leur étendue. Oui, on peut dire que ce fut dans toute leur étendue, puisque la nuit qui suivit l’arrivée de Versailles fut trop courte pour Mars et pour Vénus ; le jour d’après partageoit une partie de leurs ébats, et les dégoûts qui suivent de si près les plus purs contentemens n’osèrent pas troubler le doux passe-temps de notre monarque.

Ce fut dans ces doux momens que mademoiselle de Fontange obtint du roi la grâce de… qui lui avoit inutilement été demandée par la bouche de plus d’un prince. Il lui accorda une pension considérable en faveur d’une demoiselle