Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 3, éd. Boiteau, 1858.djvu/91

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vous faites de mon amour et par l’indifférence avec laquelle vous recevez mes protestations.—Je n’ai, Monsieur, lui répondit-elle froidement, ni rigueurs ni douceurs à votre égard ; je me connois, et il me suffit d’avoir pour vous le respect qui est dû à votre rang, sans envisager autre chose. » En finissant, elle sortit brusquement de la chambre et se rangea avec ses compagnes, sans qu’il pût l’obliger à rester, quelque prière qu’il fît. Néanmoins il ne laissoit point passer d’occasion sans lui parler de son amour, et il croyoit remarquer quelque avance dans ses affaires, lorsqu’il fut obligé d’aller prendre possession d’une terre peu éloignée, qu’une tante lui venoit de laisser par sa mort. Avant de sortir de la province, il voulut lui dire adieu ; mais il ne la put trouver en particulier, parce qu’elle étoit occupée auprès de sa dame, qui se trouvoit mal ; il résolut pourtant de lui écrire, ce qu’il fit incontinent qu’il fut arrivé au lieu où il devoit être, et, pour lui faire tenir sa lettre avec sûreté, il fit partir un de ses gens pour visiter de sa part la dame chez qui elle étoit, avec ordre de lui rendre à elle-même la lettre, ce qu’il fit. D’abord qu’elle l’eut reçue, elle ne savoit si elle la porteroit à sa maîtresse ou si elle la liroit. Son esprit demeura ainsi quelque temps en suspens ; mais enfin la curiosité l’emporta, et elle l’ouvrit et y lut ces mots :