Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/108

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plus charmantes que les plus beaux jours de l’année. Enfin, on peut dire que cette plaine étoit un camp magnifique, où plusieurs palais enchantés parurent dans un moment.

Cette grande fête commença par divers ballets, où le Roi lui-même, Messieurs les princes du sang, et plusieurs autres seigneurs parurent sur les rangs. Les festins, la comédie et tous les autres divertissements suivoient tour à tour, et alloient en augmentant. La nuit même ne les faisoit pas cesser, ou pour mieux dire, il n’y avoit pas de nuit, à cause du grand nombre de flambeaux qui éclairoient tous les endroits du bois. On peut juger si cet agréable mélange de tant de différentes personnes de l’un et l’autre sexe, ce grand concours de monde, cette confusion du jour et de la nuit, cette liberté qu’inspirent les plaisirs champêtres, et enfin cette joie qui accompagne les grandes fêtes, et qui fait que grands et petits, hommes et femmes, se mêlent sans distinction ; on peut, dis-je, juger si ces charmants désordres étoient propres pour les aventures et pour les mystères d’amour.

Le Roi qui ne songeoit qu’à se rencontrer seul avec la comtesse en quelque lieu écarté du bois, fit naître diverses occasions, dont une lui parut réussir enfin. Le troisième jour de cette fête, qui finit à l’ordinaire par un magnifique festin, le Roi proposa une mascarade après le souper, où chacun, tant hommes que femmes, pourroit se masquer à sa fantaisie, se promener dans le bois ainsi déguisé, et faire cent petites malices. La chose fut ainsi exécutée, chacun prit la figure qui lui plut le plus ; les uns se travestirent