Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/178

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M. de Pontchartrain. — Sire, je prends la liberté de remontrer à Votre Majesté que l’on ne peut à présent aller si vite ; la ville et la campagne sont ruinées par les taxes, les impôts et les contributions ; vos peuples meurent de faim[1], et sont tellement accablés de misères, qu’ils ont beaucoup plus besoin d’un prompt soulagement, que d’être encore surchargés par de nouveaux impôts.

Le Roi. — Qu’ils fassent comme ils l’entendront ; mais il faut bien qu’ils payent ou qu’ils crèvent. Voilà qui est admirable ! doivent-ils travailler pour d’autres que pour moi qui suis leur Roi, et tous leurs biens ne m’appartiennent-ils pas de droit, comme madame de Maintenon

  1. Vos peuples meurent de faim. — « Si, en 1688, on se plaignoit que les paysans n’avoient point de lits pour se coucher, aujourd’hui plusieurs manquent de paille (1707). » — Mém. de Boulainvilliers, II, 152. — « On ne sçauroit compter combien il meurt de pauvres paysans à la porte des plus riches bénéficiers, sans secours spirituel ou temporel, faute d’un peu de nourriture ou du plus simple remède. » (Ibid., p. 126.) — « Le règne de Louis XIV, — despotique, bursal, très-long et par conséquent odieux, — a détruit l’abondance en tirant des sujets au-delà de leurs forces et en détruisant la consommation intérieure… il a pareillement détruit la confiance en découvrant un fonds de mauvaise intention et d’artifice dans les ministres, digne d’une éternelle exécration. » (Ibid., pp. 1, 8-9.) — « Les fortunes subites des financiers ont excité plusieurs marchands à quitter le commerce,… et une infinité d’autres à quitter l’agriculture… De là vient que tant de fabricants et de laboureurs ou fermiers ont été ruinés, que les terres sont incultes ou mal façonnées, et que les banqueroutes sont si fréquentes. » (Ibid., p. 16-17.) — Les extraits qui précèdent nous dispensent de citer les passages si connus où La Bruyère, Vauban, etc., dépeignent la misère du peuple. — Cf. Vie de Mme de Miramion, pp. 320 et sq.